Babel dans le désert moderne

BABEL 500Par Urbain DESVILLE, 27 mai 1997

Pour Michel ANTONIETTI

Comme les hommes se déplaçaient à l’Orient, ils traversèrent une vallée au pays de Shinéar et ils s’y établirent. Ils se dirent l’un à l’autre : – Allons ! Faisons des briques et cuisons les au feu ; La brique leur servit de pierre et le bitume leur servit de mortier. Ils dirent : – Allons ! Bâtissons-nous une ville et une tour dont le sommet pénètre les cieux ! Faisons-nous un nom et ne soyons plus dispersés sur toute la terre ! Ce nom, ils le trouvèrent bien plus tard et plus à l’Occident, quand ils fédérèrent leurs îles quelque part en Méditerranée. Ils dénommèrent leur territoire, l’Archipel. Maintenant, aucun dessein n’est irréalisable pour eux ! Cette civilisation occidentale, née en Méditerranée, par le verbe, pour un territoire et sur une utopique construction, est le mortier qui scelle les dissemblances des architectes du groupe ARCHIPEL. Leurs édifices, comme les livres épars de la bibliothèque de Babel font pour Ariane égarée dans la Babel nucléaire, un fil conducteur moderne.

L’impossible adoption de la liberté d’une modernité introuvable ou des ambiguïtés d’un classicisme dissonant, permet à deux frères collés l’un à l’autre comme le rivage et la mer, à une femme à l’imagination débordante : de signer une œuvre collective en forme de MANIFESTE construit. Ce travail attestant de l’incontournable nécessité de réformer radicalement l’environnement contemporain. Proclamer que l’Architecture et l’Urbanisme sont des pratiques sociales avortées si elles n’ambitionnent pas une dimension culturelle, projet de la MODERNITÉ. Des édifices qui satisfont, par essence les besoins de leur commanditaire, mais non sans un recours à l’utopie, méthode d’investigation rigoureuse apparentée au traditionnel voyage de l’exil, mère imaginaire de la cité idéale. Les  artistes de l’atelier s’obsèdent, souvent jusqu’à l’impossible, en quête d’un essentiel personnage, le MAITRE DE L’OUVRAGE, figure idéalisée de la puissance publique. Sa rencontre produisant souvent, un bâtiment fonctionnel, une réalité commode, et toujours une œuvre à l’essence esthétique !

Les responsables du cadre de vie de cette fin de siècle, capables de provoquer leur savoir-faire, et perméable à l’emphase de leur propos, au lyrisme de leurs espaces, à l’éclairage parfois cru de leur lumière méditerranéenne, se trouvent souvent récompensés d’une tendre passion à faire le Beau pour récuser l’absurde. Être ou ne pas être Architectes, construire en vrai d’imaginaires rêves d’encre et de papier, tel est le pari de leur dessein utopiquement réel.

Verbe, espace, territoire, réminiscences d’anciennes obsessions occidentales, ARCHIPEL c’est l’éclectisme moderne synthétisant l’accumulation des signes de l’époque.

VERS ARCHIPEL ARCHITECTES