C’est un matin doux et amer

C’est un matin doux et amer où la vie n’a que cet âge pour dire : viens, et parlons.
Après le deuil la lumière est nue, sans traces qui nous fondent. Épuisée d’un amour voulu comme une fête, devenu peu à peu feuille tremblante, guérissable blessure.
Une main, une voix, doigt à doigt, mot à mot, courbe et ligne courbe de mon corps pour aimer leur caresse. Et puis l’éclat, la dureté du réel pour empêcher et recouvrir la faim. Le dénuement n’est que la marque toujours présente du déjà, du déjà-là proféré en abime. L’esprit en feu, en friable douleur, aimant esprit. Et la lampe tenace des mots accroche sa ronce en moi.
Précis et tendres, signes fidèles, signes attentifs, écartelants et clos de la voix qui cerne la promesse. Au déliement de leur venue, à leur silence, cette demande pour achever l’inachevable.
Car l’ombre remplie d’étoiles et de terre prend la saveur d’un lendemain amputé et meurtri. Soleil couchant de l’amour qui irradie avant de s’éteindre et dont la veine pourpre mène au vivant.
Je sais que je ne sais rien mais je prononce ce que je dois sans bruit, car c’est encore l’éternité qui s’attend.

Sylvie Fabre G.